S T I L
Fred Eerdekens
Mediateur - Win Van den Abbeele, Les Nouveaux commanditaires de Belgique
Cimetière, Schoten, Belgique, 2018
La commande
A Schoten en Belgique, les œuvres d’art publiques sont généralement le résultat de concours. Parce qu’il s’agissait dans ce cas-ci de réaliser une œuvre pour un cimetière, un lieu chargé de sens pour de nombreuses personnes, le conseil de la ville a choisi de faire appel à un artiste via un groupe de commanditaires. Win Van den Abbeele, médiateur auprès des Nouveaux commanditaires a ainsi supervisé le processus.
Les commanditaires
Le groupe de commanditaires était constitué de représentants de la culture, du conseil des arts, du service de l’environnement ainsi que de quelques représentants religieux et de spécialistes divers.
Description de la commande
Les commanditaires souhaitaient une œuvre qui demande de rester immobile et invite à la réflexion. Une œuvre d'art comportant une certaine poésie et faisant référence à la "transformation". Après tout, ce que la mort garantit est avant tout un changement ; nous nous transformons pour devenir quelque chose de différent, quelqu'un d'autre ou peut-être rien? Quoi qu’il en soit, le changement sera ressenti par ceux qui restent.
STIL
Ce message se retrouve dans l’œuvre STIL de Fred Eerdekens. Celle-ci est constituée d’un mur en acier Corten de 7,5 mètres de long transpercé de 145 poteaux en aciers de différentes longueurs (longueur maximale 1,5 mètre) au bout desquels sont fixés de petits miroirs ronds.
Lorsque le spectateur se trouve à une position prédéterminée par rapport à l'œuvre, tous les miroirs réunis retranscrivent le mot « Stil » ("Calme"). Les miroirs eux-mêmes sont orientés à 45° vers le ciel. Cet agencement possède ainsi un côté à la fois symbolique et pratique : les miroirs reflètent la lumière dans les yeux du spectateur afin de lui fournir un texte lisible.
Le matériau à partir duquel le travail a été réalisé subit également une transformation, à l'instar des survivants du défunt. Il progresse lentement mais progressivement vers sa forme finale. La plaque finira par virer au brun rouille due à une couche d'oxydation.
L'artiste : Fred Eerdekens
Fred Eerdekens (°1951) est un artiste visuel belge. Il vit et travaille à Hasselt. Il a été diplômé de l'Institut supérieur provincial d'architecture et d'art et de l'Atelier Grafiek de l'Académie des Beaux-Arts de Heusden-Zolder. Il a également été conférencier auprès du PHL à Hasselt et du HISK à Anvers. Sa carrière a été interrompue pendant quatre ans à la suite d'un grave accident de la route en 2006.
Eerdekens travaille principalement en trois dimensions les éléments que sont le langage, le matériau, la lumière et l’ombre. Il écrit lui-même les textes qui constituent la matière première de ses œuvres. Son œuvre - par ailleurs très plastique - est le début d'un monde qui ne peut être représenté que par des mots. Dans l'ombre, là où il n'y a pas de lumière, se raconte souvent une histoire au sujet des choses qui manquent. Parfois courte, parfois lyrique ou langoureuse.
De plus, il utilise diverses techniques et matériaux, notamment l'aquarelle.
Le langage et l'univers de Fred Eerdekens
Le langage est-il un moyen de créer de l'ordre dans le monde? Notre pensée renvoie-t-elle au langage, ou bien est-ce l'inverse? C'est très difficile à définir et très incertain. Les concepts et les choses ne se chevauchent pas complètement. Rien ne coïncide jamais complètement avec son nom.
Le cœur du travail tourne autour de cet affrontement entre langage et monde des objets. Ou, en d'autres termes, entre le texte et l'image. L'un est simplement la reconnaissance des choses, l'autre est un processus complexe de compréhension.
Dans le cas de l'œuvre d'art, regarder et lire sont deux activités (cérébrales) complètement différentes qui se déroulent plus ou moins simultanément. Il en résulte souvent un paradoxe. Vous regardez pendant que vous lisez à propos de ce que vous regardez. Ou vous lisez, pendant que vous regardez des choses qui se révèlent être un texte.
Parler en silence est une caractéristique frappante des œuvres de Fred Eerdekens. Bien qu’elles se composent principalement d’espaces physiques et de matériaux concrets, le spectateur ne peut s'empêcher de penser à la voix (absente).
Le silence est souvent associé au repos, ainsi qu'au respect et à la réserve. Un cimetière comme celui de Schoten ne fait pas exception. Un endroit calme invite à contempler et à méditer.